Comment stocker l’eau ? Cette question traverse les millénaires, et il semblerait que la solution miracle n’ait pas encore été trouvée. À moins que… Et si les nouvelles technologies n’avaient rien de transcendant à nous apporter concernant la gestion de nos réserves d’eau ? Remettons les techniques ancestrales et low-tech au goût du jour ! Pour preuve, comparons le système des méga-bassines et celui des johads, en Inde.
Stocker l’eau avec les méga-bassines et les johads : deux salles deux ambiances
Méga bassines : pourquoi font-elles parler ?
« Le problème c’est que ce ne sont pas vraiment des réservoirs, mais plutôt des moyens d’amasser toujours plus d’eau. » – Jaume Grau, porte-parole des Ecologistas en Acción.

La méga-bassine (ou « réserve de substitution ») est un système de stockage d’eau qui a récemment fait couler beaucoup d’encre dans les journaux et sur le net. Vous en avez sûrement entendu parler avec le cas de Sainte-Soline.
Ces cuves de rétention d’eau gigantesques dotées de dispositifs de pompage puisent directement dans les nappes phréatiques. L’eau est remontée à la surface de la terre dans un réservoir artificiel étanche. Ces bassines de 8 hectares minimum (soit environ 10 terrains de football) empêchent donc tout lien avec le sol et le vivant.
Ce système de puisage est energivore et demande une grosse modification de tout l’environnement alentour. Il faut enfouir le système de tuyaux, installer une pompe (pas la petit pompe à pieds du van que vous avez loué le temps d’un week-end, non non, la bonne grosse pompe qui tire des litres et des litres à la minute). Je vous laisse imaginer l’impact environnemental et la consommation du bazar.
L’avantage de ce système serait de piocher dans les stocks lorsqu’ils sont hauts (en hiver) pour pouvoir ensuite en profiter tandis que les réserves commencent à baisser (en été). Ainsi les niveaux resteraient dans une fourchette acceptable.
Cette « solution » est extrêmement coûteuse et privatise une ressource publique. En réalité, les méga-bassines servent uniquement aux grandes exploitations agricoles ayant les moyens de financer de tels projets. En prime, ce type de stockage est soumis à un fort taux d’évaporation et interfère dans le cycle naturel de l’eau.
Johads : pourquoi personne n’en parle ?

Les johads, ou Khadin, vous ne connaissiez pas ? Je vous l’avoue, il n’y a pas si longtemps, moi non plus !
Ce système de stockage de l’eau est en symbiose avec son environnement. Nous pourrions le comparer à nos retenues collinaires, même s’il en diffère quelque peut. Les populations indiennes utilisent ce procédé depuis plus de 3 500 ans. Abandonnés aux suites de la colonisation par les Britanniques (merci les gars), les Khadins ont été remis au goût du jour et permettent le retour de certains cours d’eau alors asséchés.
Au lieu de puiser dans les nappes, c’est l’eau de pluie et les ruissellements qui en découlent qui remplissent les johads. La retenue n’est pas étanchéifiée, l’infiltration de l’eau stockée vers les nappes phréatiques et les cours d’eau se fait donc naturellement. En prime, ils favorisent le développement de la biodiversité.

Pour mettre en place un johad, pas besoin de technologies modernes. Vive la low-tech, vive la terre ! Ce système, géré de manière communautaire, est très peu coûteux comparé à la méthode précédente. L’eau reste donc accessible à tous et à toutes. Eh oui ! En plus de ne pas privatiser cette rare ressource, les johads sont utiles pour l’agriculture et les besoins domestiques.
Faire des réserves d’eau de pluie : une préoccupation depuis des millénaires
Stocker l’eau : depuis l’antiquité
Depuis l’Antiquité, les Égyptiens, les Romains et les Grecs construisent des systèmes de récupération et de stockage de l’eau de pluie. Cette gestion de l’eau a plusieurs buts :
– irriguer les cultures ;
– besoins domestiques ;
– consommation en eau potable (oui au passage c’est pas mal quand même).
Le monde arabe a apporté de grandes avancées concernant la collecte et le stockage de l’eau. En Inde, des barrages et réservoirs voient également le jour. Ils permettent de récupérer l’eau de pluie qui tombe en importante quantité lors des moussons, et moins souffrir des périodes de sécheresse. Il est donc possible de stocker sur une longue durée les réserves et de maintenir les cours d’eau et les nappes phréatiques.
Conserver les ressources en eau : de nos jours
De nos jours, la gestion de l’eau de pluie et des réserves est plus que jamais au centre des considérations politiques. Avec l’urbanisation constante, la variation du climat et une croissance démographique effrénée, les besoins sont en perpétuelle évolution.
Bien sûr, certaines régions en zone arides et semi-arides font face à des difficultés encore plus fortes que les pays européens, par exemple. Mais cela n’empêche pas de réfléchir à la façon de gérer cette ressource.
Les choix sont plus qu’arbitraires, avec une culpabilisation des populations d’un côté et une croissance des usines (entre autres) qui épuisent les nappes phréatiques (Coca-Cola au Mexique, on vous voit !).
Gérer nos consommations : les bonnes questions

Et si nous changions notre manière de cultiver ? Les monocultures sur des hectares, ça va 5 minutes. Quitte à dépenser des millions dans des moyens de régir l’eau : pourquoi ne pas réinventer les réglementations de production et modifier les usines qui consomment et polluent à outrance ? Et si nous arrêtions de déféquer dans de l’eau potable ? Tout cela permettrait de résoudre une grande partie du sujet.
À plus petite échelle, le thème de l’eau, de son stockage et de son utilisation est également très abordé. Toute personne orientée vers l’autonomie (voire même le survivalisme), la low-tech, l’économie et la gestion censée des ressources planétaires s’est penchée sur la question. J’aborderai avec plaisir tout cela dans un prochain article.
Avec une simple comparaison de ces deux systèmes, il est aisé de se demander pourquoi les décisions se tournent vers les nouvelles technologies, lorsque la low-tech des peuples ancestraux a déjà fait ses preuves. * Gros sous *. Pardon, j’ai glissé chef. Ou pas ?

- 10 questions sur les méga-bassines – Vert, le média qui annonce la couleur ;
- Les Johads, une alternative low-tech – Notech Magazine ;
- Le loupé des méga-bassines en Espagne – La Relève et la Peste ;
- Image de couverture – Ideogram ;
- Giph – Giphy.